L’année 2022 marque le 60ème anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, mais également de l’exode des Français d’Algérie dont beaucoup ont été accueillis à Perpignan. Retour sur ce chapitre essentiel de l’histoire de notre pays mais aussi de notre territoire.
En 1962, plus d’1 million de personnes ont dû quitter brutalement leur terre natale, l’Algérie, et nombreux sont ceux qui sont arrivés dans les Pyrénées-Orientales et particulièrement à Perpignan.
Une ville nouvelle pour accueillir l’exode
Perpignan est l’une des rares villes de France où l’accueil qui leur a été réservé a été chaleureux. Le maire de l’époque, Paul Alduy, qui avait lui-même travaillé en Algérie, a mis à disposition, les services nécessaires pour aider cette population. A ce moment-là, la Ville Nouvelle du Moulin à Vent était en construction et le maire a décidé de donner la priorité aux français d’Algérie privés de logements afin qu’ils puissent s’installer dans un habitat correct. Cet ensemble urbanistique s’attachait à préserver le concept d’une architecture méditerranéenne harmonieuse. Le Moulin à Vent est très vite devenu un quartier, presque un village, aux couleurs de « là-bas » puisque s’y sont retrouvés des natifs d’Algérie, souvent des gens dont les origines étaient espagnoles, italiennes, maltaises, etc.,. Ils ont souvent trouvé la une oreille attentive, un soutien de nombreux catalans comprenant le désarroi de ces familles arrachées avec brutalité à la terre de leurs ancêtres.
Un devoir de mémoire essentiel
« Marquée par cette page sombre de l’Histoire de la France, Perpignan terre d’accueil, aux portes du bassin méditerranéen œuvre pour la préservation de cette mémoire. C’est la raison pour laquelle, dans le cadre de ce 60ème anniversaire, il était essentiel pour la Mairie de Perpignan de prendre part à cet indispensable devoir de Mémoire, mais aussi de transmission aux jeunes générations, et sans lequel l’avenir ne peut se construire sereinement », déclare Louis Aliot, Maire de Perpignan
La Ville, en partenariat avec le Cercle algérianiste, a souhaité programmer de nombreuses manifestations tout au long de cette année 2022.
Suzy Simon-Nicaise, présidente nationale du Cercle algérianiste et fondatrice du Centre de Documentation des Français d’Algérie, nous livre les détails et les enjeux de cette année mémorielle.
Il s’agit d’une date et d’un anniversaire importants, quels en sont les enjeux ?
En effet, nous avons décidé, en accord et en étroite collaboration avec l’équipe municipale, de marquer ce 60ème anniversaire de l’exode des Français d’Algérie. Malheureusement l’actualité nous rappelle aujourd’hui ce qu’est un exode. Il faut rappeler que nombre de français d’Algérie n’avaient jamais traversé la mer. J’ai d’ailleurs une pensée toute particulière pour les harkis et leurs familles, qui ont été eux aussi brutalement enlevés avec violence à leur terre et ont reçu en Métropole un accueil bien pire que celui globalement réservé aux européens d’Algérie. Alors nous avons décidé en 2022 d’organiser des manifestations pour faire partager à nos compatriotes, l’histoire de ces Français, pour la plupart de condition modeste, contraints à l’exode sans autre choix que la valise ou le cercueil.
Perpignan œuvre particulièrement pour ce travail de mémoire…
A Perpignan nous avons la chance, au Cercle algérianiste, d’œuvrer depuis plus de quarante ans pour sauvegarder et promouvoir notre culture, transmettre notre mémoire et défendre notre histoire et rétablir la vérité. Cette mémoire encore vivace, cet esprit des Français d’Algérie, cet amour de notre Patrie, sont les fondements de notre engagement. Nous animons également, en partenariat avec la Ville de Perpignan, le Centre de Documentation des Français d’Algérie, où nous faisons connaître l’histoire des 132 ans de la présence française en Algérie. C’est dans ce lieu qu’a été édifié le Mémorial national des Français disparus en Algérie, ces personnes enlevées qui n’ont jamais été retrouvées. Sont inscrits sur ce Mémorial 2 412 noms, dont 352 de personnes disparues entre le début de la guerre d’Algérie (1er novembre 1954) et la signature des Accords d’Evian (18 mars 1962).
Le programme des manifestations est très complet, en particulier pour ce mois de juin ?
En effet, plusieurs temps forts, dont certains ont déjà eu lieu, ponctuent l’année. Ainsi, le 12 mars dernier un film consacré au rôle des femmes durant la guerre d’Algérie a été projeté ; le 19 mars, avec le maire, Louis Aliot, nous avons présenté, dans le patio de l’Hôtel de Ville, une exposition de portraits de quelques-unes des victimes de l’après 19 mars 1962. Et bien d’autres événements.
Nous allons maintenant nous retrouver pour ces grandes journées du mois de juin. A cette occasion, le Cercle algérianiste organise son 43ème congrès national placé sous le thème des hommages et de la transmission aux plus jeunes, en présentant près d’une vingtaine d’expositions, des tables rondes, des films, des témoignages… Se tiendra également le 5ème Forum algérianiste du Livre. Le dimanche matin sera le temps du recueillement, avec une procession jusqu’à la cathédrale. Ces journées seront aussi l’occasion de partager des souvenirs au Village des retrouvailles installé devant le Palais des Congrès dans des cabanons qui rappelleront ceux des plages d’Algérie, et des moments de convivialité avec un grand méchoui le dimanche. Enfin, le 5 juillet nous commémorerons le massacre d’Oran, qui a vu la disparition tragique de centaines d’innocents.
*Le cercle algérianise est une fédération de 41 représentations locales, avec plus de 8 000 adhérents au plan national. A Perpignan, la ‘section catalane’ du Cercle a vu le jour en 1976.
Edouard Gebhart, conseiller municipal délégué aux anciens combattants et aux rapatriés
« Il était essentiel pour la Ville de Perpignan d’organiser et de prendre part de façon active aux commémorations à l’occasion de ce 60ème anniversaire. La guerre d’Algérie reste encore aujourd’hui une cicatrice vive pour beaucoup de Français, de nombreuses familles de rapatriés, sans oublier les descendants des harkis, lesquels ont été pour la plupart enfermés dans des camps et ce dans des conditions inhumaines. 60 ans après cela reste une tâche sur l’histoire de France. J’invite donc tous les Perpignanaises et les Perpignanais à venir partager avec nous ces temps de mémoire afin de mieux comprendre cette page de notre histoire ».
Un lieu de mémoire
Les objectifs du Centre sont de transmettre, explorer, enrichir et analyser le patrimoine matériel et immatériel des Français d’Algérie. A la fois centre de documentation, vitrine d’une civilisation et laboratoire de pensée autour des exils, le Centre de Documentation des Français d’Algérie a pour vocation de laisser une trace de ces générations qui, pendant 132 ans, ont été liées à l’histoire de la France et de l’Algérie.
Le Centre de Documentation des Français d’Algérie (CDDFA) a ouvert ses portes en 2012 dans le magnifique cadre de l’ancien couvent Sainte-Claire. Il abrite des expositions, de nombreux témoignages matériels et immatériels qui constituent aujourd’hui un fonds documentaire unique, exceptionnel, et dans son jardin, le Mémorial national des Français disparus en Algérie.
La mémoire partagée ne pouvant se faire que dans la vérité historique, ce centre est un endroit où l’on trouve tous les documents permettant de comprendre.
Centre de Documentation des Français d’Algérie
1 rue Général Derroja
Tél : 04 68 66 30 18
Ouvert du lundi au vendredi de 10h à 12h et de 14h à 17h
43ème congrès national du cercle algérianiste & 5ème Forum du livre
60 ans après ! Perpignan, capitale des Français d’Algérie :
Le temps des hommages et de la transmission
A perpignan, du 24 au 26 juin 2022, retrouvez de nombreux événements, en particulier au Palais des Congrès :
- 5ème Forum algérianiste du Livre
Salon permanent des écrivains
Plus de 70 auteurs présenteront leurs ouvrages dont la ri chesse et la diversité reflètent le dynamisme de la production lit téraire algérianiste (roman, essai historique, monographie, bande dessinée, photographie, …).
- Village des Retrouvailles
C’est là que les participants originaires des mêmes villes ou villages d’Algérie pourront se réunir. Il y sera également possible de se restaurer rapidement.
- 19 expositions en ville
Renseignements
• Cercle algérianiste national 1 rue général Derroja 66 000 Perpignan Tél : 04 68 53 94 23 secretariat@cerclealgerianiste.fr
• Cercle algérianiste de Perpignan 1 rue général Derroja 66 000 Perpignan Tél : 04 68 35 51 09 cercle-algerianiste.perpignan@orange.fr