Marine Martin, présidente de l’Apesac (Association des Parents d’Enfants souffrant du Syndrome de l’Anti-Convulsivant), nous communique sous le titre « Condamnation de l’État dans le dossier Dépakine« , avec prière d’insérer :
« Le tribunal administratif de Montreuil a rendu sa décision ce jour dans le scandale de la Dépakine pour trois dossiers de familles victimes. Le juge a conclu à la responsabilité de l’État à hauteur de 20% à 40% selon les dates de naissance des enfants. Cette décision était attendue par les familles.
C’est une première victoire car jusqu’alors aucun dossier n’avait était porté devant le juge administratif. En 2016 déjà, le rapport de l’Igas pointait l’inertie de l’Ansm. Son directeur Dominique Martin avait confirmé publiquement le manque de réactivité des pouvoirs publics à mettre en conformité la notice du médicament avec l’état des connaissances scientifiques du moment.
La mise en cause des médecins par le juge administratif était moins attendue. En effet dans le cas d’une grossesse gémellaire réalisé par Pma[1] à Paris en 2008, les deux enfants souffrent de troubles autistiques graves, pour lesquels le juge a estimé que la responsabilité des médecins était engagée à hauteur de 60%.
Cette décision nous semble cohérente car dès 2006 le Rcp[2] indiquait aux médecins que cet antiépileptique ne devait pas être donné chez les femmes enceintes et en âge de procréer.
La décision du juge est par ailleurs dramatique dans le cas du dossier de Nicolas, né en 1985 qui sera dédommagé de 30 000 euros pour ses malformations mais s’est vu opposer un refus d’indemnisation pour ses troubles autistiques, à l’opposé des autres victimes qui se verront allouer près d’1 million d’euros. Pourquoi ?
Le juge a suivi les réquisitions du rapporteur public, considérant que le lien entre les troubles autistiques et la prise de la Dépakine n’ont été connus qu’en 2004. Cette date incompréhensible est en totale contradiction avec la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 qui stipule que dès 1984, des cas d’autisme avaient été signalés à la pharmacovigilance. Ce « Curseur » de 2004 élimine de fait 80% des dossiers de victimes qui ne seront jamais indemnisées pour ce pôle de préjudice. Seuls les enfants nés entre 2004 et 2015 se verraient indemnisés ?
La famille fera certainement appel de cette décision de justice qui semble anticonstitutionnelle au regard de la loi. L’Apesac et le Cabinet Dante continueront à lutter pour défendre le droit des victimes à une indemnisation décente en cohérence avec les décisions amiables proposées à l’Oniam. »
[1] Pma : Procréation Médicalement assistée
[2] Rcp : Résumé des Caractéristiques du Produit.