Les minéraux semblent saupoudrer d’émeraude les flancs du volcan, créant un contraste saisissant avec la terre brûlée. À 1868 mètres d’altitude, le souffle court, je contemple l’un des plus beaux spectacles naturels de Nouvelle-Zélande. Les Emerald Lakes du Tongariro Alpine Crossing brillent sous le soleil matinal, tandis que des volutes de vapeur s’échappent des fissures du sol. Cette randonnée d’une journée n’est pas seulement un défi physique, c’est un voyage au cœur d’une terre sacrée.
Dans les pas des Māori : une traversée entre mythes et volcans
Le Tongariro Alpine Crossing s’étend sur 20,2 kilomètres à travers le parc national du Tongariro, le plus ancien de Nouvelle-Zélande, créé en 1887 et classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Ce territoire volcanique actif est profondément sacré pour le peuple Māori. Chaque lac, chaque sommet raconte une histoire ancestrale.
« Il ne faut jamais toucher l’eau des Emerald Lakes ou du Blue Lake », me prévient mon guide avant le départ. « Ces eaux sont tapu – sacrées – pour les Māori. Les toucher serait une grave offense. » Cette spiritualité imprègne chaque pas du parcours, transformant la randonnée en pèlerinage culturel.
Le mont Ngauruhoe, parfait cône volcanique qui se dresse fièrement le long du parcours, a d’ailleurs connu une notoriété mondiale en servant de « Montagne du Destin » dans la trilogie du Seigneur des Anneaux. La fiction rejoint ici une réalité géologique fascinante, où la terre semble encore en formation.
L’épreuve de la « Devil’s Staircase » et la récompense des cratères
La randonnée débute au parking de Mangatepopo (1120 m) par une montée graduelle. Mais le véritable test commence avec la « Devil’s Staircase » (l’Escalier du Diable), une section abrupte qui met à l’épreuve même les randonneurs expérimentés. La sueur perle sur mon front tandis que je m’accroche aux roches volcaniques pour gravir les 300 mètres de dénivelé.
L’effort est récompensé par l’arrivée au South Crater, vaste étendue lunaire où le silence n’est troublé que par le crissement des pas sur la cendre volcanique. Puis vient l’ascension finale vers le Red Crater, point culminant du parcours à 1868 mètres. La terre, d’un rouge sang impressionnant, témoigne de la puissance tellurique qui façonne ces montagnes.
La périlleuse descente vers les joyaux turquoise
Après le sommet, la descente vers les Emerald Lakes constitue le passage le plus technique du parcours. Une pente vertigineuse de 36° sur terrain meuble exige concentration et équilibre. « C’est comme skier sur du gravier », plaisante un randonneur britannique qui dérape à côté de moi.
La difficulté s’efface devant la splendeur des trois lacs émeraude dont la couleur turquoise irréelle provient des minéraux volcaniques dissous. Cette alchimie naturelle crée sans doute l’un des tableaux les plus saisissants de Nouvelle-Zélande, un site dont l’unicité rappelle nos vallées pyrénéennes classées à l’UNESCO.
Un microcosme géologique en constante évolution
Plus loin sur le parcours, le Blue Lake (Te Wai-whakaata-o-te-Rangihiroa en māori) offre une surface parfaitement lisse d’un bleu profond. Contrairement aux Emerald Lakes, ses eaux sont moins acides mais tout aussi sacrées. Les fumerolles actives rappellent que nous marchons sur un volcan endormi mais bien vivant.
En redescendant vers Ketetahi (terminus du parcours), la végétation réapparaît progressivement, comme si nous revenions d’un autre monde. La nature reprend ses droits après les paysages lunaires des hauteurs, créant des contrastes rappelant les cols pyrénéens entre deux écosystèmes.
Conseils pratiques pour affronter le Crossing
Cette randonnée exigeante nécessite une préparation soignée. L’automne néo-zélandais (avril) offre des températures plus fraîches (10-15°C) et des paysages aux teintes rousses magnifiques, mais attention aux changements météorologiques soudains.
Un service de navettes (45-60 NZD) relie les deux extrémités du parcours depuis Whakapapa Village. Réservez à l’avance, surtout en haute saison où plus de 1500 personnes peuvent s’élancer chaque jour sur ce sentier mythique.
Emportez au minimum 2 litres d’eau, des vivres énergétiques et habillez-vous en couches superposables. Des chaussures de randonnée robustes sont indispensables pour affronter la descente glissante vers les lacs. Pour bien préparer votre voyage en Nouvelle-Zélande, n’oubliez pas qu’un vol long-courrier vous attend.
FAQ : Tout ce qu’il faut savoir sur le Tongariro Alpine Crossing
Quelle est la meilleure période pour entreprendre cette randonnée ?
De novembre à avril (été austral), avec une météo plus stable. Décembre et janvier offrent les journées les plus longues mais aussi la plus forte affluence. L’automne (avril) propose des couleurs magnifiques avec moins de monde.
Peut-on faire cette randonnée sans guide ?
Oui, le sentier est bien balisé. Néanmoins, en hiver (juin-septembre), un guide est fortement recommandé car la neige peut recouvrir le parcours et les conditions deviennent alpines.
Pourquoi les lacs sont-ils turquoise ?
La couleur exceptionnelle des Emerald Lakes provient des minéraux volcaniques dissous, principalement du soufre et des composés ferreux. L’acidité de l’eau contribue également à cette teinte unique.
Le Tongariro Alpine Crossing est-il dangereux ?
Il comporte des risques, notamment des conditions météorologiques changeantes et des sections techniques. Chaque année, les services de secours interviennent pour des randonneurs mal préparés. Renseignez-vous sur la météo avant de partir et n’hésitez pas à rebrousser chemin si nécessaire.