Estagel : « De la grave au pont neuf »

Match de vétérans. Jean-Claude aux avants postes



C’était le titre de la rubrique locale d’Estagel tenue par Jean-Claude Garrigue et qui a marqué des générations d’Estagelloises et d’Estagellois. Le premier réflexe, à l’ouverture du journal était bien celui-ci : « que dit Jean-Claude en cette journée » ?
Cet automatisme était celui des habitants de notre cité, mais bien au-delà.

Jean-Claude est de ces hommes au caractère fort, indomptable, inaliénable, qui marquent la vie d’un village de cette encre indélébile mais combien visible pour ceux qui ont à cœur leur village. De cette encre, grâce à laquelle nous aimerions voir le passé fait des meilleures choses de la vie, réapparaître comme une résurgence venue des entrailles de la terre pour le bonheur de tous.

Nous avons donc pensé qu’il était de notre devoir d’écrire ces quelques lignes pour montrer, au travers de Jean-Claude, sa modestie dut-elle en souffrir, l’esprit d’un village : le nôtre.
Toujours très matinal encore aujourd’hui, pain frais et bien cuit oblige, il était souvent au retour de la jeunesse au petit matin sur la place. Maintenant, il vient de loin en loin, boire un petit café à la terrasse du « commerce » ou ses amis ne manquent pas de venir le saluer. Ainsi, son œil aiguisé, son oreille attentive, aux aguets, sont toujours prêts à saisir au moindre frémissement d’une parole, d’un regard, d’un geste, une situation inédite, nouvelle, demandant une sensibilité exacerbée envers la vie de son village, de ses habitants.

Jean-Claude et un de ses anciens "protégés"
Jean-Claude et un de ses anciens « protégés »

Le correspondant local de « l’Indep ».

Il couvrait la majeure partie des événements. Le sport, les associations organisatrices d’une soirée, la kermesse de la paroisse, la fête du PCF local. Elle n’existe plus aujourd’hui, ou encore les divers moments de la vie communale.
Par contre, il ne fallait surtout pas essayer de lui dire, ni même en sourdine, ce qu’il devait écrire où pas. Les situations étaient claires envers tous. Il avait bien raison. Cela n’empêchait pas, bien au contraire, que les choses étaient écrites avec toute la finesse que prête notre belle langue aux amoureux de la liberté de penser.
Comment aurait-il utilisé les nouveaux moyens de communication que nous connaissons, mis à notre disposition, avec la phobie de l’écriture qui était la sienne ? Nous sommes persuadés qu’il en aurait fait le meilleur usage.

Le passionné, le mordu de rugby à XIII

Lorsque l’occasion se présente, Jean-Claude aime rappeler qu’il a bien été l’initiateur des écoles de rugby à XIII. S’inspirant de l’exemple et des conseils de ses amis Provençaux à l’initiative dans ce domaine, il a mis en place la première école dans son village : Estagel, fief treiziste, amplement reconnu dans notre département comme tel et au-delà. En Provence, le rugby à XIII, a toujours été le sport roi.
Tous les anciens de cette époque, se rappellent l’entraîneur, le meneur d’hommes. Ainsi, ayant la parfaite connaissant de chacun, il n’hésitait pas à tester les joueurs à des postes différents. De centre à talonneur, il réagissait en fonction du caractère du joueur. Ses décisions étaient toujours respectées. Tous savaient son engagement, la noblesse de sa parole donnée. Cette dernière valait d’un acte.
Bien sûr, il y avait aussi les troisièmes mi-temps, vénérables au possible, mais en permanence dans la responsabilité, l’amitié.

Jean-Claude avec ses petits organisant le tourniquet
Jean-Claude avec ses petits organisant le tourniquet

Jean-Claude n’a jamais voulu s’engager politiquement.

Il sait pourtant ce que veulent dire les mots laïcité, démocratie. Ils n’ont aucun mystère pour lui depuis longtemps.
Amoureux de son village, il savait le faire respecter en toute circonstance. Une de ses amantes, reste la fête Arago des 30, 31 août et 1er septembre. Disons que sa carrure pour le moins impressionnante, était pour quelque chose dans sa façon d’être. Un homme charmant, jovial, qui ne se laissait pas marcher sur les pieds, qui ne s’en laissait pas compter. Pour autant, encore aujourd’hui, fidèle en cela à son esprit toujours aussi critique, il ne porte jamais aucun jugement définitif, sur rien ni personne. Il aurait pu devenir un élu conséquent au Conseil municipal pour servir son village.

L’heure de la retraite a sonné

La "tronçonneuse". Un des outils préférés de Jean-Claude
La « tronçonneuse ». Un des outils préférés de Jean-Claude

Toujours un peu provocateur, surtout après un match télévisé à XV, il nous confiait : « Je vais allumer la mèche ». Mais sur la place d’Estagel, l’esprit sportif l’emportait sur les autres considérations. Jean-Claude n’était pas pour rien dans ces sains raisonnements. Après tout, XIII ou XV, quelle importance, tant que la transpiration mouille le maillot aux couleurs de son village. L’esprit était bien celui-là.
Il savait que ces querelles n’avaient qu’une importance très relative. Il savait que les personnes présentes avaient du discernement. Il savait que les contradicteurs possibles, finiraient leurs querelles feintes ou pas, devant un « jaune » pratiquement dans tous les cas. Ceci, parce que les différents propos étaient dits à la loyale. Les yeux dans les yeux.
Pour Jean-Claude, personnage haut en couleur s’il en est un, l’heure de la retraite a sonné. La fontaine devant son magasin et bien avant dans le temps le pont-bascule, auraient encore des choses à raconter. Tous les mots n’existent pas pour faire revivre ces moments. Dommage !
La tronçonneuse à remplacé le stylo. Jean-Claude, en homme d’action, devait bien trouver un dérivatif pour ne pas sombrer dans l’inactivité qui ravage un homme si ce dernier n’y prend garde.

Bonne retraite Jean-Claude « y per mults ans »

Joseph Jourda

 

Jean-Claude et l'école de rugby
Jean-Claude et l’école de rugby
Si je suis tombé par terre, c'est la faute à Voltaire... Non, là, c'est la fontaine !
Si je suis tombé par terre, c’est la faute à Voltaire… Non, là, c’est la fontaine !