Journée Mondiale contre le Cancer 2022/ Cancer au féminin : les impacts sociaux, intimes et professionnels en questions

Couple, famille, travail, vie sociale… En marge de la Journée Mondiale contre le Cancer le 4 février prochain, une étude réalisée par Viavoice pour l’Institut Curie(1) interroge les Français et scrute les problématiques sociétales des cancers chez la femme. Elle révèle notamment des disparités en terme de charge mentale, d’organisation familiale, de vie intime et de retour à l’emploi, dans un contexte où près de 60% des Français se sentent concernés par le risque d’être atteint d’un cancer.

« Les chiffres nous le rappellent : chaque année, le nombre de cancers chez la femme augmente, sous l’effet du tabagisme ou par défaut de prévention. Précarité, retour à l’emploi, charge mentale, organisation du foyer… pendant et après les traitements, la survenue d’un cancer chez une femme est une rupture renforcée et l’impact social de la maladie est plus lourd pour elles. L’Institut Curie, au quotidien, prend soin de ces femmes à travers des parcours adaptés, des dispositifs d’accompagnement complets, la formation de nos soignants. Mais, pour soutenir les femmes face au cancer et dans chacun des aspects de leur vie, c’est collectivement qu’il nous faut agir, à tous les niveaux de la société », déclare le Pr Steven Le Gouill, directeur de l’Ensemble Hospitalier de l’Institut Curie.

Une femme sur deux estime qu’il existe des inégalités par rapport aux hommes en matière de charge mentale et d’organisation familiale face aux cancers
Charge mentale, organisation familiale, maintien de la vie professionnelle, retour à l’emploi, précarité : lorsqu’on interroge les Français sur leur perception des inégalités face au cancer, ce sont les éléments les plus cités et très nettement en défaveur des femmes. Ainsi, parmi 43% des Français qui pensent qu’il existe des inégalités entre hommes et femmes en matière de charge mentale et d’organisation familiale, 37% d’entre eux pensent que ces inégalités sont en défaveur des femmes contre 6% seulement en défaveur des hommes. Le cancer vient aggraver les inégalités femmes-hommes à tous les niveaux de la société.

Plus de la moitié des Françaises pense que les femmes atteintes de cancer ne peuvent pas retrouver la même vie professionnelle qu’avant la maladie, un facteur aggravant les situations de précarité des femmes. Si une personne sur cinq n’a pas repris le travail un an après les traitements, les femmes ont eu plus d’arrêts de travail et plus d’aménagements du temps de travail que les hommes (source INCa : étude Vican 5). De plus, 8% des Français estiment que la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle fait partie des principales difficultés pour le retour à l’emploi des femmes alors que cet aspect n’est pas mentionné pour les hommes. Si les enjeux de maintien dans l’emploi chez les cadres supérieurs sont importants, les conséquences financières de la maladie sont parfois dramatiques chez des femmes qui vivent seules, avec des revenus moins conséquents, plus isolées. Ce sont d’ailleurs 45 % des personnes interrogées qui estiment que les inégalités entre Français sur les cancers sont d’abord liées aux revenus (salaires, aides sociales…).

Cette problématique de maintien et de retour à l’emploi est bien réelle. Dans ce domaine, l’Institut Curie, notamment à travers son Unité transversale d’éducation thérapeutique, est fortement mobilisé ; à l’instar du projet qui vient de démarrer avec l’association WeCare@Work. Ce nouveau projet porte sur les représentations du travail pour les professionnels de santé, la facilité d’arrêter le travail et inclut un volet d’éducation thérapeutique visant un changement de culture et d’autonomie du patient ainsi qu’une relation soignants-soignés plus à l’écoute.

Evelyne Renault-Tessier, directrice de l’unité transversale d’éducation thérapeutique de l’Institut Curie (Utep), précise : « En lien avec des associations de patients, des patients partenaires, avec le soutien du service interentreprise de santé au travail, notre équipe a mis en place un atelier sur ce sujet du retour au travail dont le besoin s’avérait important pour les patientes. Avec l’arrêt de l’activité professionnelle, se joue la perte d’une identité sociale. Comment évoquer le sujet auprès de son employeur ? Comment en parler à son équipe ? Par ailleurs et grâce à l’amélioration des soins de support, de l’organisation des soins, notamment avec l’hospitalisation à domicile, plus que le retour à l’emploi, c’est la question du maintien dans l’emploi qui se pose de plus en plus souvent. En effet, l’arrêt de travail, pas toujours justifié sur le plan médical, est une question difficile que nous travaillons dans le cadre de nos travaux sur l’amélioration du parcours de soin. Il faut changer cette vision du statut de malade qui est en opposition avec le statut professionnel et à l’inverse, ne pas pointer du doigt le fait qu’une femme peut ne pas être tout le temps une « super working woman » ».

Oser briser les tabous
Aujourd’hui, en France, une femme sur deux considère que les femmes ne peuvent pas retrouver la même vie intime qu’avant d’être malade. « La sexualité n’est ni un luxe ni un tabou et la santé sexuelle des femmes est au coeur du processus thérapeutique. Il est crucial de pouvoir évoquer et légitimer ces questionnements autour de la sexualité et de l’intimité. C’est pourquoi aujourd’hui, à l’Institut Curie, nous sommes investis non seulement dans la sensibilisation et la formation des soignants mais aussi dans la mise en place d’un parcours de soins « santé sexuelle » pour les patientes qui sont confrontés aux conséquences intimes et sexuelles du cancer et de ses traitements », explique le Dr Sylvie Dolbeault, psychiatre, cheffe du service psycho-oncologie et social de l’Institut Curie. Elle rappelle également que « Les choses évoluent et se structurent en France. En septembre 2021, l’Inca a labellisé un référentiel sexualité et cancer qui a donné lieu dans notre Institut à la création d’un groupe de travail oncosexologie ».

Douleur, altération de l’image du corps, peur de la récidive, sentiment d’être isolée dans la société… comment aider les femmes à vivre pendant et après leur cancer ? A travers son département pluridisciplinaire dédié aux soins de support, l’Institut Curie propose un accompagnement global à ses patientes. Soignants, psychiatres, psychologues explorent chez leurs patientes leur état psychologique, fatigue, image du corps, estime de soi, insertion professionnelle, soutien social et autres préoccupations vitales. La nutrition et l’activité physique adaptée sont deux autres aspects incontournables de cette prise en charge. De plus, depuis plus de deux ans, des ateliers d’éducation thérapeutique se sont structurés avec des proches et des aidants, avec des associations et autres réseaux, des partenaires… pour aborder entre autre vie de couple, organisation familiale, retour au travail avec les patientes.

Plus de 70% des patients de l’Institut Curie sont des femmes de tous âges
Leader européen dans la prise en charge des cancers du sein, l’Institut Curie traite également les femmes souffrant de cancers gynécologiques (cancer du col de l’utérus, de l’ovaire…) et de cancers ayant d’autres localisations. L’Institut Curie fait avancer la recherche sans relâche grâce à de nouvelles solutions thérapeutiques, avec ces dernières années de nouvelles molécules ou de nouvelles stratégies thérapeutiques pour les femmes. Sans cesse, l’Institut Curie adapte ses parcours de soins selon les besoins spécifiques et l’âge des femmes. Si les adolescentes requièrent une prise en charge très particulière, les femmes âgées, plus fragiles, ont besoin de traitements ajustés et sont prise en charge par l’équipe d’oncogériatrie. Quant aux femmes jeunes, un parcours dédié aux patientes atteintes de cancer du sein voit le jour à l’Institut Curie.
Les cancers de la femme et leur prise en charge peuvent impacter la féminité, la fertilité, et la sexualité. Y compris lorsque les cancers n’affectent pas directement la sphère génitale, le domaine intime et sexuel peut être altéré. « L’accès et la prise en charge de l’onco-fertilité ont beaucoup évolué ces dernières années, notamment grâce à l’amélioration de l’information apportée aux patientes et l’optimisation du parcours de prise en charge », explique le Dr Florence Coussy, gynécologue-oncologue à l’Institut Curie.

Résultats complémentaires de l’étude ViaVoice pour l’Institut Curie
Sur le retour à la vie professionnelle > Selon les Français, les principales difficultés pour une femme ayant guéri du cancer, lors de son retour à la vie professionnelle sont de subir le regard des autres et les préjugés (16%), de retrouver sa place d’avant (13%), de réussir à être performante (13%).
Les Français inquiets pour leur proche > 68% des Français se sentent concernés par le risque qu’un proche soit atteint d’un cancer (76% pour les catégories socio-professionelles supérieures).

Les Français se sentent bien informés sur les risques de facteurs de risque du cancer en général (65%)
Le niveau d’information concernant les facteurs de risque de cancer en général : 59% des jeunes (18-24%) pensent qu’ils ne sont pas suffisamment informés en termes de prévention alors que pour 67% des 65 ans et plus, les personnes s’estiment suffisamment informées.

Cancers chez la femme : données générales et chiffres clefs en France Source : Panorama des cancers en France (édition 2021) de l’INCa
– Les cancers en France : 2e cause de décès chez la femme, 1ère cause chez l’homme
– 382 000 nouveaux cas de cancers dont 46% chez les femmes (soit 177 400 cas) en 2018
– Les cancers les plus fréquents chez la femme : sein (33%); colorectal (11%), poumon (8,5%)
– L’incidence du cancer du poumon progresse fortement chez les femmes (+ 5% par an) et transforme considérablement l’épidémiologie du cancer.
– En 2018, le nombre de nouveaux cas d’hémopathies malignes (cancers du sang) en France métropolitaine est estimé à près de 45 000 (25 000 chez l’homme et 20 000 chez la femme).
– Grâce aux diagnostics de plus en plus précoces, aux progrès thérapeutiques considérables avec notamment l’arrivée de nouvelles molécules et une meilleure prise en charge à tous les niveaux, on observe une diminution globale de la mortalité : de -2% par an chez les hommes et – 0,7% chez les femmes.
– 3 dépistages disponibles chez la femme : sein, col et côlon

A propos de l’Institut Curie
L’Institut Curie, 1er centre français de lutte contre le cancer, associe un centre de recherche de renommée internationale et un ensemble hospitalier de pointe qui prend en charge tous les cancers y compris les plus rares. Fondé en 1909 par Marie Curie, l’Institut Curie rassemble sur 3 sites (Paris, Saint-Cloud et Orsay) 3 600 chercheurs, médecins et soignants autour de ses 3 missions : soins, recherche et enseignement. Fondation privée reconnue d’utilité publique habilitée à recevoir des dons et des legs, l’Institut Curie peut, grâce au soutien de ses donateurs, accélérer les découvertes et ainsi améliorer les traitements et la qualité de vie des malades. Pour en savoir plus : curie.fr

1. Étude réalisée par Viavoice pour l’Institut Curie réalisée en ligne en janvier 2022 auprès d’un échantillon de 1500 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. Représentativité assurée par la méthode des quotas appliquée aux critères suivants : âge, sexe, catégorie socioprofessionnelle des interviewés par région et catégorie d’agglomération.